Au cœur du Théâtre Libre à Paris, une nouvelle interprétation de l'opéra le plus joué au monde, Carmen, s'épanouit sous la direction audacieuse de Julien Lestel. En seulement 1h10, Lestel nous offre une adaptation originale et féministe de cette œuvre emblématique, interrogeant avec brio les thèmes de la liberté, du désir et de la mort.
Depuis sa création, Carmen fascine par son personnage central, une femme qui choisit de sacrifier sa vie pour sa liberté. Lestel évoque cette figure comme une étoile dansante, rappelant la célèbre Marianne de Delacroix, symbole de la liberté guidant le peuple. Dans cette réinvention, il s'agit de donner à Carmen une nouvelle chance, une rédemption face aux violences et aux injustices qui touchent les femmes. Révolté par les féminicides et les brutalités faites aux femmes, Lestel souhaite faire progresser l'égalité sur scène, en offrant à chaque personnage une place égale dans l'histoire.
Dans cette version, Don José, Micaëla et Escamillo ne sont plus de simples faire-valoir. Ils sont mis en avant, gagnant en profondeur et en humanité. Lestel s'éloigne des stéréotypes traditionnels pour créer des relations plus nuancées entre les personnages. L'amour, loin d'être une guerre, devient une danse poétique où les rapports de force s'effacent, laissant place à une étreinte empreinte de grâce. Don José guide une Carmen moins cruelle, plus respectueuse, vers une exploration des sentiments qui transcende la souffrance.
La musique de Bizet, bien que respectée, est enrichie par des influences contemporaines. Lestel intègre les percussions de Shchedrin et les sonorités modernes d'Ivan Julliard, créant une sorte de fraternité musicale qui met en valeur chaque élément. Cette fusion musicale agit comme un révélateur, enrichissant l'expérience du spectateur.
Lestel interroge également la violence inhérente à l'amour, souvent synonyme de souffrance. Dans sa chorégraphie, chaque geste, chaque mouvement est chargé d'émotion. La danse devient un langage, une expression palpable des sentiments des personnages. Le public est entraîné dans un voyage émotionnel, ressentant la douleur de Don José et la tragédie de Carmen. La scène finale, où le cœur de Carmen s'arrête de battre, laisse une empreinte indélébile dans l'esprit des spectateurs.
Au Théâtre Libre, cette œuvre prend une nouvelle dimension, invitant le public à redécouvrir l'essence même de Carmen à travers un prisme moderne et engagé. Une expérience à ne pas manquer pour tous les amateurs de danse et de théâtre, qui trouveront dans cette performance une émotion palpable et une fluidité inégalée entre les danseurs, traduisant avec justesse la complexité des relations humaines.
Chorégraphie : Julien LESTEL
Production : Alexandra Cardinale Opéra Ballet Production
Musiques : Georges BIZET / Rodion SHCHEDRIN / Iván JULLIARD
Lumières : Lo Ammy VAIMATAPAKO/ Costumes : BJL
Assistant chorégraphe : Gilles PORTE
Avec les 10 danseurs du Ballet Julien Lestel
