Put Your Soul on Your Hand and Walk, la force tranquille de Fatma, un film nécessaire
Durée : 1h47
Sortie en salle : mercredi 25 septembre
Certaines œuvres dépassent le cadre du cinéma. Le documentaire de Sepideh Farsi, Put Your Soul on Your Hand and Walk, en fait partie. Né d’un échange numérique entre la cinéaste franco-iranienne et Fatma Hassouna, jeune photographe palestinienne, le film témoigne avec une sobriété bouleversante des jours sombres de l’offensive israélienne sur Gaza, entre 2024 et 2025.
Le dispositif est minimal, dicté par les circonstances : des visioconférences fragiles entre deux femmes que tout oppose, sauf une même urgence de raconter. Face à une webcam instable, Fatma parle. De la peur, de l’espoir, de la vie quotidienne rongée par la guerre mais jamais totalement effacée. Les silences, les coupures d’électricité, les bruits sourds des frappes ponctuent son récit. Mais surgissent aussi, par éclats, un sourire, une voix qui s’accroche, une lumière inattendue.
Cette phrase que Fatma répète comme une incantation « Mets ton âme dans ta main, et marche » devient le fil rouge du film. Car marcher, ici, c’est résister. Photographier, c’est témoigner.
Sepideh Farsi tisse, à travers ces fragments d’écran, un récit à la fois intime et collectif. Sans voix off, sans discours explicatif : juste la force d’une parole nue, fragile et essentielle. Jusqu’au silence final. Le 16 avril 2025, Fatma est tuée lors d’une frappe aérienne, quelques jours avant que le film ne soit sélectionné à Cannes. Le documentaire devient alors plus qu’un témoignage : un hommage, un lieu de mémoire.
Mais jamais Farsi ne verse dans le pathos. Son regard, pudique et politique, reste fidèle à celui qu’on lui connaît (Un été à Téhéran, Le Voyage de Maryam). Elle s’efface pour laisser toute la place à celle qui, même absente, continue de parler.
Une présence debout au cœur des ruines
Le film suit Fatma dans son quotidien, sans surligner, sans expliquer. On la voit marcher, souvent, dans des paysages marqués par l’attente et la destruction : rues effondrées, écoles aux vitres brisées, marchés improvisés. Et pourtant, à travers chaque plan, se dessine une beauté inattendue : celle de la dignité, de la persistance, de ces gestes simples qui deviennent héroïques dans un monde en miettes.
Jamais le film ne fait de Fatma une héroïne. C’est dans ce refus de l’héroïsation qu’il touche au plus juste.
Lumière, poussière et persévérance silencieuse
Dans ce décor brisé, Put Your Soul on Your Hand and Walk raconte une forme de survie, non pas spectaculaire, mais ancrée dans la volonté d’exister pleinement malgré tout.
Et puis, il y a ce sourire. Rarement un sourire aura eu autant de force au cinéma. Celui de Fatma n’est ni bravade, ni déni. Il surgit parfois, fragile, inattendu. Il dit : « Je suis encore là. » C’est peut-être dans ces instants que le film atteint son intensité la plus pure.
Ce documentaire n’est pas un manifeste. Il ne cherche ni à convaincre ni à expliquer. Il choisit d’écouter, de montrer, de laisser de l’espace. Il s’inscrit dans une tradition de cinéma humaniste, où la confiance est donnée au spectateur.
Put Your Soul on Your Hand and Walk saisit la force digne de rester debout, coûte que coûte. Comme Fatma.


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