En garde, une quête de vérité sous tension
Un duel aussi physique que psychologique.
En garde est un film déroutant, presque inconfortable, qui s’inscrit profondément dans une culture chinoise dont les codes, les silences et les non-dits façonnent chaque scène. Dès les premières minutes, le spectateur est invité à se méfier : des personnages, des intentions, et surtout de ce que le film semble vouloir raconter. Rien n’est jamais totalement stable, ni acquis.
Au cœur du récit, une relation fraternelle ambiguë, dominée par un frère dont la parole, l’attitude et les gestes laissent penser à une figure manipulatrice. Le film joue habilement avec cette perception. Tout nous pousse à croire à cette version des faits, à adopter le point de vue proposé, à nous installer dans un confort moral trompeur. Mais En garde n’est pas un film qui rassure : il préfère déstabiliser, remettre en question, déplacer les certitudes.
À mesure que l’histoire avance, un chemin vers la vérité se dessine, lent, sinueux, semé de faux-semblants. Le retournement final, inattendu et troublant, renverse complètement la lecture initiale. Ce que l’on croyait comprendre s’effondre, laissant place à une réalité plus complexe, plus dérangeante encore. Le film rappelle alors une idée centrale : la vérité n’est jamais là où l’on pense la trouver.
Une phrase résonne particulièrement, comme un avertissement lancé au spectateur autant qu’aux personnages : ne pas s’approcher trop près, sous peine d’être déçu par ce que l’on découvre. Cette mise en garde devient le cœur du film.
La métaphore de l’escrime traverse subtilement le récit. Être “en garde”, c’est adopter une posture de défense permanente, anticiper le mouvement de l’autre, avancer sans jamais baisser sa vigilance. Comme dans un duel, chaque parole est une attaque possible, chaque silence une feinte. Le film lui-même devient un adversaire, obligeant le spectateur à rester alerte jusqu’à la dernière seconde.
En garde est un film exigeant, dérangeant, qui refuse toute lecture simpliste. Il interroge la confiance, la manipulation et la construction de la vérité, tout en s’ancrant profondément dans une culture où le non-dit peut être plus violent que la parole. Une expérience cinématographique qui marque durablement, précisément parce qu’elle nous apprend à ne jamais relâcher notre vigilance.


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